Lectures :
1 R 19, 9a.11-13a : … mais le Seigneurs n’était pas dans le feu…
Rm 9,1-5 : … sont en effet les fils d’Israël, ayant pour eux l’adoption, la gloire, les alliances… Mt 14,22-33 : Confiance ! C’est moi; n’ayez pas peur !
En regardant un peu autour de nous, il est aisé de constater que la quête du spirituel est assez répandue. A part, bien évidemment, des perturbations liées au COVID-19, les hôtelleries d’abbayes sont remplies presque toute l’année.
Les gens, seuls ou en familles, partent à la recherche de ce qui devient de plus en plus rare : silence et calme.
Le quotidien et ce qui lui est lié nous sature à tel point que nous partons volontiers dans un endroit désert, loin de la civilisation….
D’ailleurs, au début du confinement total imposé au printemps dernier, malgré les graves inquiétudes face à un virus peu connu, une bonne majorité d’entre nous se félicitait de l’arrêt presque total du monde et de son économie…
Après quelques semaines, la situation s’est gâtée, mais au début beaucoup disaient : comme c’est bien d’entendre le silence, d’avoir un temps pour soi et pour sa famille, d’arrêter la course effrénée du quotidien, de revoir les oiseaux et les animaux revenus dans les villes et les villages.., de respirer un air pur…
Nous avons entendu, dans des émissions télévisées ou à la radio, des philosophes et des politiques qui disaient qu’il faut changer, une fois le confinement fini, notre mode de vie et qu’il faut inventer une autre manière de consommer, plus économe et plus respectueuse de la nature et de ses réserves.
Cependant, depuis, il a fallu deux mois pour se rendre compte combien de fois cette coupure était illusoire et les souhaits éphémères !
Inconsciemment, quasi automatiquement, nous emportons de nouveaux avec nous nos ordinateurs, nos tablettes, nos téléphones portables, des dossiers que nous n’avons pas traités auparavant. Le télétravail si vanté, finalement, à présent, oblige les gens à travailler plus, quasi en permanence… La frontière entre le lieu de travail et la vie privée s’est volatilisée.
Et combien de personnes faisant du jogging ont des oreillettes – signe visible qu’ils sont encore ailleurs, même si, physiquement, ils sont dans un endroit précis.
Un jour, j’étais à table avec une famille… dans un beau cadre de la Sainte Baume. Les plats étaient bons, le temps était magnifique… mais un jeune garçon de 12 ans, au lieu de participer au repas, consultait son téléphone portable…
Tout en étant là, il se trouvait ailleurs. Décalé, enfermé dans son monde à lui…
Autiste sans même s’en rendre compte.
Le livre des Rois, que la liturgie de ce dimanche nous donne en première lecture, nous invite à être attentifs à la parole et aux signes que Dieu nous adresse au cours de notre vie. Il est prêt à nous visiter à tout moment.
Cependant, sommes-nous disposés à saisir sa présence ?
Nous avons lu tout à l’heure : Elie fut arrivé à l’Horeb, la montagne de Dieu.
Selon d’autres livres de la Bible, l’Horeb est le lieu où Moïse reçut le Décalogue : ce haut lieu serait donc identifié par certains biblistes comme étant le Mont Sinaï. Sans entamer de polémiques, pour moi, ce qui compte aujourd’hui le plus, est le fait qu’Elie ait quitté la plaine, son lieu d’habitat et qu’il soit monté pour être en disposition de rencontrer Dieu.
Etait-il sûr de le voir ?
Par forcément : mais il a tout fait pour.
De temps en temps, je rencontre des personnes qui me parlent de leur désir de voir Dieu, de tisser avec lui des liens particuliers. Ils me confient également leur désarroi dans cette quête.
Parfois, je les interpelle: où le cherchez-vous ?
Dieu n’est pas dans le brouillard et les choses confuses. Il n’est ni dans l’ouragan de nos émotions, ni dans le tremblement de colère, ni dans le feu de notre orgueil.
Il est précédé par le murmure d’une brise légère, c’est-à-dire lorsque les sens de l’homme sont disposés à recevoir sa présence… et cela n’est pas si évident.
Perturbés par les aléas du quotidien, nous avons du mal à reconnaître le Seigneur qui passe pourtant, non loin de nous.
Regardons l’Evangile.
Nous voyons des apôtres, donc les plus proches disciples du Christ, qui rament durement.
Ils sont partis la veille mais, vers la fin de la nuit, ils sont encore sur la mer.
Leur barque était battue par les vagues car le vent était contraire. Ils ne pouvaient donc pas avancer comme ils voulaient. Nous pouvons imaginer sans difficulté leur état d’esprit et de corps. Même si, dans la majorité des cas, ils étaient pécheurs, donc une nuit passée sur l’eau n’était pas pour eux si exceptionnel, cependant, cela n’enlève nullement la fatigue qu’ils endurent.
Le nez dans le guidon, ils ne voient pas le Seigneur arriver.
Lorsqu’ils l’aperçoivent, ils ne le reconnaissent pas et poussent des cris.
Et c’est bien ce qui se passe dans notre vie. Occupés, submergés par les multiples tâches quotidiennes, fatigués, éternellement insatisfaits parce que les choses ne vont pas comme nous les souhaiterions, nous ne voyons pas Dieu qui passe au milieu de nous.
De surcroît, nous pouvons ne pas l’entendre non plus, car branchés à nos appareils de compagnie, nous restons dans notre bulle… Ailleurs.
C’est le cas du peuple juif dont nous parle st Paul.
Il pleure son autisme : de la part de Dieu, ce peuple a reçu tout ce qui est nécessaire pour reconnaître le Messie en la personne de Jésus Christ. Mais non.
Il ne l’a pas reconnu.
Et pourtant, les Juifs, avaient pour eux l’adoption, la gloire, les alliances, la Loi, le culte, les promesses de Dieu, les patriarches…
De leur race même le Christ est issu…
On peut être si proche et pourtant, si lointain…
On peut être élu, et pourtant perdre la chance de vivre dans le bonheur.
On peut être témoin d’un miracle, on peut marcher sur les eaux à l’instar de Saint Pierre et pourtant s’enfoncer jusqu’au cou, si l’on ne professe pas humblement et constamment :
Ô mon Jésus, vraiment, tu es le fils de Dieu.