Père Przemyslaw KREZEL
Paroisse St Pierre et St Paul
en Val d’Azergues
Diocèse de Lyon
Le binôme de l’Esprit Saint
Pentecôte, année B, le 20 mai 2018
Lectures :
Act 2,1-11 : Ils se trouvaient réunis tous ensemble.
Ga 5,16-25 : les fruits de l’Esprit Saint : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi.
J 15,26-27 ; 16,12-15 : Quand viendra le Défenseur, que je vous verrai….
Mes frères et sœurs bienaimés,
Aujourd’hui je commencerai par une question simple :
la prière est-elle importante dans la vie de l’Église et de chaque chrétien ?
Notre réponse ne peut être que positive.
Sans la prière, c’est évident, nous n’aurions plus de moyens d’entrer en relation intime et vivante avec Dieu. Sans elle, nous serions incapables d’intérioriser, donc d’assimiler l’enseignement de notre Seigneur Jésus Christ.
Sans la prière, nous deviendrions une terre stérile, hostile à l’accueil des dons de l’Esprit Saint portant en eux la vie.
D’ailleurs, les conséquences d’une vie de foi où la prière est négligée sont assez immédiatement manifestes. Celui, celle qui ne prie plus, très vite « sèche » les messes dominicales et quitte la communauté paroissiale, en s’interrogeant sur son bien-fondé …
Effectivement, sans la prière, la part de doute augmente en nous…
Cependant, devant cette évidence, je voudrais associer une autre question à laquelle la réponse n’est pas toujours si évidente.
Est-ce que la prière suffit pour être considéré comme un bon chrétien ?
Qu’en pensez-vous, mes frères ?
J’espère que nous sommes d’accord : la prière seule ne remplit pas le cahier des charges du véritable disciple du Christ.
Dans la foi que notre Maître, Jésus, nous a léguée, la prière engendre systématiquement l’acte – le « faire » si vous voulez bien.
Le Ora et labora – prie et travaille – la célébrissime devise des bénédictins, résume parfaitement la conduite à adopter.
Même les contemplatifs les plus stricts comme les chartreux, les camaldules, les sœurs et frères de Bethléem suivent cette règle. Ils prient assidûment, ils s’adonnent au travail, souvent manuel, pour ne pas perdre le contact avec le réel. Au chapitre 48 de la règle de saint Benoît, nous pouvons lire : l’oisiveté est ennemie de l’âme.
Et cela est important de le souligner car la prière sert parfois d’excuse pour ne pas accomplir ce qui est à faire dans le monde, dans sa famille, auprès de ses frères et sœurs chrétiens, vis-à-vis de la mission de porter la Bonne Nouvelle….
La Pentecôte que nous fêtons est une preuve de plus que Dieu met la prière et l’action en binôme : l’une alimente l’autre, l’autre concrétise la première.
Je ne sais pas si vous avez quelques tableaux en tête représentant le moment de la Pentecôte ?
Grosso modo : Marie, sainte Mère de notre Seigneur, se tient, assise ou debout, au centre de tableau, à ses gauche et droite, se tiennent les apôtres. Parfois, derrière eux, peut-on apercevoir les figures d’autres disciples… Au-dessus de leurs têtes planent de petites langues de feu.
C’est la Pentecôte – le moment où les disciples du Christ sont confirmés dans leur mission qui est….. prier et travailler pour le salut du monde.
Les apôtres n’ont pas reçu l’Esprit Saint pour leur propre confort, pour rester immobiles et enfermés au cénacle, satisfaits de leur proximité avec Dieu ;
L’Esprit Saint leur a été donné pour qu’ils partent de là-bas, pour qu’ils quittent leur ville qu’ils connaissaient si bien. Ainsi, l’Esprit Saint n’a fait que confirmer la mission que le Christ lui-même leur a donnée le jour de son ascension :
Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit.
Par conséquent, la Pentecôte n’est pas un évènement statique…
Relisez le texte des actes des apôtres : ça décoiffe !!!!
Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient [….]. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.
Frères, en connaissant le tempérament des orientaux, imaginez-vous ce joyeux brouhaha ?
Je ne sais si vous avez visité un jour un souk dans un pays arabe, mais je pense que la Pentecôte lui rassemblait : liberté, spontanéité, croisement … et malgré tout cela, une certaine harmonie… du charme…
Voilà le signe de la vitalité de la foi : la générosité, le débordement, le sans-mesure…
Là où l’Esprit Saint fuse on ne s’ennuie pas parce que la sève divine circule dans les veines des disciples et la foi fleurit sur la terre stérile le moins propice à la vie.
A contrario, la mort sévit, immobilise, s’installe, multipliant les justificatifs enfantins :
« Que le monde d’aujourd’hui est dur »
« les gens ne croient plus comme d’autrefois »
« pourquoi se donner de la peine pour seulement quelques personnes »
Mes chers frères et sœur bienaimés,
Le pessimisme ne caractérise pas l’Esprit Saint. Il en a horreur.
Certes, l’Esprit est sans visage, presque sans nom propre – comme l’écrivit le père Congar, dominicain, expert du Concile Vatican II. Cependant c’est le vent qu’on ne voit pas, mais qui fait bien bouger quelque chose. C’est par ses effets qu’on le connaît.
Par ses effets qu’on le reconnait….
Alors, les fruits de l’Esprit Saint sont les suivants, selon saint Paul :
Amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi.
Et cela est du concret, vous en êtes d’accord avec moi.
Je vous propose donc un devoir à la maison… bien évidement après un bon repas festif et une sieste régénérante – fête oblige !
Mais après ?
Prenez un temps avec vous … et sous le regard de Dieu, lisez le texte de la lettre aux Galates dans lequel saint Paul énumère les fruits de l’Esprit Saint. C’est la deuxième lecture du jour…
Prenez les l’un après l’autre…
Est-ce que j’aime… qui, quand, toujours ?
Est-ce que j’en suis heureux… en quels moments, pourquoi ?
Et avec ma patience, où en suis-je ?
Et ainsi de suite….
Mes frères et sœurs bienaimés, il est important que nous fassions cette mise au point…
Car peut-être que, malgré le sacrement de la confirmation que nous avons reçu un jour, l’Esprit Saint ne s’est pas encore vraiment installé en nous…. Il est comme une colombe qui survole sur notre tête mais, faute de stabilité, ne peut se poser….
Peut-être qu’il est grand temps de lui ouvrir la porte de notre cœur pour qu’il produise enfin ses fruits dont le monde a tant besoin.